Par Sandra Embollo
En octobre dernier, Michel Manueli Likeng Mbappe et ses deux complices auraient déchargé une rafale de 19 coups de feu en pleine rue au centre-ville de Montréal.
Les tirs visaient un immeuble où était situé le cabinet d’avocat de Benamor, bien connu comme le propriétaire d’un édifice du Vieux-Montréal où sont mortes sept personnes dans un incendie criminel en mars 2023. Likeng Mbappe possédait un dossier criminel déjà bien étoffé, même avant sa plus récente arrestation non loin de ses bureaux.
À tout juste 20 ans, il avait déjà passé plus d’une année derrière les barreaux en lien avec des affaires d’introduction par effraction, de possession d’une camionnette volée et de conduite dangereuse en 2023 et 2024.
Aux yeux de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), c’était assez pour rédiger un rapport sur son cas pour cause de «grande criminalité» en mai 2024, selon des documents obtenus par notre Bureau d’enquête.
Né au Cameroun, arrivé au Canada dans son adolescence et n’ayant jamais obtenu sa citoyenneté, Likeng Mbappe risquait l’expulsion du pays vu son passé criminel et son statut de résident permanent.
Remis en liberté
Or, les procédures de renvoi ont tellement tardé que le jeune homme a eu le temps de terminer de purger sa peine de prison à l’été 2024 et d’être arrêté en marge de la fusillade en octobre.
Alors que Likeng Mbappe était de nouveau détenu, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a finalement confié son dossier à sa section de l’immigration, chargée des enquêtes, en janvier 2025.
Refusant de commenter ce cas en particulier, l’Asfc affirme que les cas de grande criminalité représentaient sa «plus haute priorité» en matière d’exécution des renvois. La première audience de Likeng Mbappe prévue pour mars à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a dû être reportée puisque l’accusé n’avait pas trouvé d’avocat.
«What the fuck»
Le Camerounais a donc comparu depuis la prison de Bordeaux le 15 avril dernier, vêtu d’un chandail en molleton gris. Avare de commentaires durant l’audience virtuelle, Likeng Mbappe a toutefois commencé à se parler à lui-même quand la commissaire est partie quelques minutes pour prendre sa décision.
«Fuck man… j’ai tiré personne… What the fuck», a-t-il marmonné en faisant les 100 pas.
La commissaire Annie Lemaine a décidé d’émettre une mesure d’expulsion contre lui, un an exactement après sa plus récente condamnation.
«Les gens ont souvent l’impression que lorsqu’un étranger est reconnu coupable, on peut l’expulser. Mais ce n’est pas aussi simple, il y a toute une procédure et des recours», souligne l’avocat en immigration Stéphane Handfield.
Likeng Mbappe ne pourra d’ailleurs pas être renvoyé avant qu’une décision soit rendue concernant son implication dans la fusillade et qu’il purge sa peine s’il y a lieu, à moins d’un retrait des accusations.
Le résident permanent pourrait aussi demander une demande de contrôle judiciaire au sujet de son renvoi.
