Par Ilyass Chirac Poumie
Dans un communiqué publié le 29 octobre 2025, l’association Survie fustige la « bénédiction discrète » de la France à l’égard du régime de Paul Biya, réélu le 27 octobre avec 53 % des voix selon le Conseil constitutionnel camerounais. Pour Survie, ce scrutin n’était qu’une « mascarade électorale verrouillée d’avance », marquée par des exclusions arbitraires de candidats, un Conseil constitutionnel entièrement inféodé au pouvoir, et une répression brutale des manifestations post-électorales.
L’Ong évoque « plusieurs morts impossibles à dénombrer » et accuse le régime d’avoir encerclé la résidence de l’opposant Issa Tchiroma Bakary, qui revendique toujours la victoire. Des poursuites judiciaires ont été ouvertes contre lui pour « plan insurrectionnel ».
Survie rappelle que le Conseil constitutionnel, composé de proches du parti au pouvoir (le Rdpc), a rejeté tous les recours en contestation du scrutin. L’association dénonce également la responsabilité de la France, accusée d’entretenir une coopération militaire et sécuritaire opaque avec les autorités camerounaises. Elle cite notamment la visite en juin 2025 du général français Hubert Bonneau à Yaoundé et les échanges réguliers entre les deux pays à la veille du scrutin.
« Ces signaux traduisent un blanc-seing donné à la répression en préparation », estime Survie, qui y voit la volonté de Paris de préserver ses intérêts économiques et son influence dans un Cameroun au bord de la succession politique.
L’organisation appelle la France à « mettre fin immédiatement à toute coopération militaire avec les forces de répression du régime Biya », à geler les avoirs et interdire de séjour en France les personnalités impliquées dans la fraude électorale, et à « ouvrir un processus de justice et de réparation pour les crimes coloniaux et néocoloniaux commis au Cameroun ».
Paul Biya, 92 ans, a été déclaré réélu à l’issue de l’élection présidentielle du 12 octobre 2025. Son principal rival, Issa Tchiroma Bakary, conteste les résultats et appelle à la mobilisation populaire. Depuis, plusieurs villes camerounaises sont le théâtre de violentes répressions policières.
La France, tout en affirmant « prendre note » de la proclamation officielle, s’est abstenue de féliciter le président camerounais. Toutefois, elle maintient une coopération militaire ancienne avec Yaoundé, héritée de la période postcoloniale, que Survie et d’autres Ong qualifient de « pilier de la Françafrique ».
