Par Joseph OLINGA N.
Le 24 mars de l’année en cours, les partisans de Paul Biya célébraient les quarante ans d’existence du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), dénomination choisie pour remplacer celle très personnalisée de l’Union nationale camerounaise (Unc), formation politique héritée de Ahmadou Ahidjo son créateur. Dans les rangs du parti au pouvoir depuis le 06 novembre 1982, peu de militants font le lien entre les évènements sanglants du 06 avril 1984 et le changement de dénomination de l’Unc dont le chantre du Rdpc a partiellement hérité de son prédécesseur Ahmadou Ahidjo.
Quarante ans après, le fringuant homme du Renouveau de 1982 a perdu de sa superbe. Assailli par le poids de l’âge et un statut sanitaire que l’on dit préoccupant, Paul Biya est moins voyant lors des évènements qui le célèbre. Absent de son anniversaire, le 14 février, organisé par ses lieutenants puis de la célébration de l’anniversaire du Rdpc dont il paraît à l’évidence l’alpha et l’oméga, le président passe le clair de son temps dans son village Mvomeka. Loin de l’agitation que suscite les rumeurs sur son “incapacité” à gouverner et de la guerre que se livrent les clans qui gravitent autour de lui.
Le président de retour au village ?
Le président acte-t’il méthodiquement son “retour au village” comme annoncé lors de la visite de son homologue français à Yaoundé ? Au sein du parti, personne ne peut jurer avec certitude. Même si le secrétaire général adjoint du Comité central du Rdpc, Grégoire Owona, acculé par les présomptions d’incapacité à gouverner énoncées par l’opposition et une grande partie de l’opinion a indiqué que le parti se tient prêt à affronter ses adversaires lors de la présidentielle prévue au mois d’octobre prochain, au cas où le président décide de rentrer au village.
L’incertitude au sein de l’opinion publique et, même, dans les rangs du Rassemblement démocratique du peuple camerounais est telle que, le parti est accoudé aux humeurs et à la disponibilité de l’homme Biya. Le congrès attendu depuis 2011 pourrait ne pas se tenir malgré la forte rumeur qui enfle au sein même du parti présidentiel pour appeler les instances dirigeantes au respect des textes. C’est dire que qu’aucun organe dans la structure du parti du flambeau ne veut prendre le risque de contrarier “l’homme providentiel”.
Le Rdpc au gré du fondateur
Le Comité central, illégal depuis plus d’une décennie a été précipitamment renouvelé après que quelques militants aient dénoncé l’illégalité du parti dans son ensemble. Selon les textes du Rdpc, le président national Paul Biya est depuis longtemps disqualifié faute d’adoubement statutaire. Du coup, des voix en interne n’ont de cesse d’appeler à la recherche de mécanismes permettant au parti de se remettre dans le train de la légalité.
En attendant, Paul Biya va-t-il donner une portée plus officielle à sa position ? Dans le Rassemblement démocratique du peuple camerounais, difficile même pour les fortes têtes d’indiquer qui peut reprendre les rênes en cas d’absence d’un président qui l’est d’ailleurs depuis de nombreuses années. Incertitude que l’on perçoit également dans la hiérarchie institutionnelle. Eux aussi sous le poids de l’âge, le président du Sénat, Marcel Niat Njifenji et celui de l’Assemblée nationale, Cavaye Yeguie Djibril ne présente aucune assurance quant à leurs capacités à gérer tout au moins les affaires courantes, au cas où…Pas de quoi émouvoir leur camarade qui défit la clameur populaire et même les voix qui s’élèvent au sein de son parti pour réclamer un renouvellement des ressources humaines.
A 92 ans dont 42 passées à la tête de l’Etat, le deuxième président de la République du Cameroun semble peu préoccupé par la suite des événements. L’homme qui comptabilise plus de soixante années dans les hautes sphères de l’État paraît même en porte-à-faux avec l’idée de la relève tant au sein de son parti le Rdpc qu’à la tête de l’Etat.
Délit d’ambition
Les trois dernières décennies ont vu passer dans les oubliettes ceux qui parmi ses partisans et lieutenants se sont rêvés un destin présidentiel.
A défaut de “mettre à la touche” tous ceux qui ont manifesté quelques ambitions, Paul Biya nourrit le mystère autour de sa succession qui fait pourtant des émules dans la machine administrative et politique. La réalité est telle que la moindre présomption d’ambition présidentielle peut valoir à quiconque se voit en rêve une réclusion à perpétuité au nom de quelques sentences judiciaires qui convainquent difficilement au sein de l’opinion.
Guerre des clans
Dans le même temps, autour du président se sont structurés des groupes de pouvoir aux relents ethniques et tribales qui prennent du relief au fur et à mesure que l’on se rapproche de l’échéance présidentielle.
Le président sait pourtant qu’il ne bénéficie pas de la mansuétude des chancelleries occidentales desquelles il semblait tenir jusqu’ici.
Le président sait aussi que, à force de s’accorder sur “ses partenaires internationaux”, il ne peut réellement compter sur ses lieutenants qui, pour la plupart, n’attendent que la glissade fatidique pour sortir leurs griffes.
Quarante ans après le coup d’État manqué, dont nombreux parmi ses proches, témoignent qu’il a structurer son mode de gouvernance, le président peut-il ignorer que le temps ne lui est pas un acquis permanent? Paul Biya occulte-t-il volontairement le
plurielles ?