Par Armand Soussia
Selon des informations révélées par Africa Intelligence le 4 novembre 2025, Issa Tchiroma Bakary, leader de l’opposition camerounaise et figure de la contestation post-électorale, s’est réfugié à Yola, dans le nord-est du Nigeria, à proximité de la frontière camerounaise. Arrivé autour du 29 octobre, il logerait dans une résidence mise à disposition par un de ses soutiens politiques.
Les services de renseignement nigérians, notamment la National Intelligence Agency (NIA), ont procédé à un premier interrogatoire dès son arrivée. Le chef du renseignement extérieur, Mohammed Mohammed, lui aurait demandé de s’abstenir de toute communication publique susceptible d’aggraver les tensions au Cameroun.
Pour l’heure, aucune demande officielle d’extradition n’a été adressée à Abuja, mais le gouvernement nigérian suit la situation avec prudence. Conscient du risque diplomatique, le Nigeria cherche à éviter une implication directe dans la crise camerounaise, bien qu’un précédent existe : en 2018, Abuja avait arrêté et remis à Yaoundé le leader séparatiste anglophone Sisiku Julius Ayuk Tabe.
Originaire de Garoua, Issa Tchiroma Bakary entretient de longue date des liens étroits avec plusieurs figures d’influence nigérianes, dont l’émir de Kano, Muhammadu Sanusi II, et l’émir d’Adamawa, Muhammadu Barkindo Aliyu Musdafa. Ces connexions pourraient lui servir de protection face à une éventuelle extradition.
À Yaoundé, le cercle présidentiel demeure divisé sur la conduite à adopter. Tandis que certains conseillers de Paul Biya plaident pour la retenue afin de préserver l’image du pays avant la cérémonie d’investiture prévue le 6 novembre, d’autres, dont le ministre de l’Administration territoriale Paul Atanga Nji, réclament son arrestation pour « remise en cause du verdict des urnes ».
Les observateurs internationaux redoutent qu’une telle décision ne ravive les tensions déjà vives au Cameroun et n’isole davantage le régime sur la scène diplomatique.
Le scrutin présidentiel du 12 octobre 2025, marqué par de fortes contestations, a reconduit Paul Biya au pouvoir selon les résultats officiels. Issa Tchiroma Bakary, qui s’est proclamé vainqueur, dénonce une fraude massive et appelle à la résistance pacifique. Depuis la proclamation des résultats, plusieurs de ses proches ont été arrêtés, parmi lesquels Anicet Ekane, Djeukam Tchameni et Jean Calvin Aba’a Oyono.
La situation politique reste explosive, alors que la communauté internationale, notamment les États-Unis, s’inquiète de la répression et de l’instabilité croissante dans la sous-région.
