Par Joseph OLINGA N.
A six mois de l’élection présidentielle, le projet de fédéralisme communautaire, l’une des principales articulations du projet de société du Président et candidat du Parti camerounais pour la reconstruction nationale (Pcrn), Cabral Libii suscite une adversion certaines chez certaines populations de la région de l’Ouest. Le candidat à l’élection présidentielle prévue en octobre prochain apprécie sans doute la pleine mesure depuis le 03 mai dernier.
La rencontre entre le sultan des Bamoun, Mouhammad-Nabil Mforifum Mbombo Njoya et le président du Pcrn, Cabral Libii a suscité des réactions inattendues chez certaines populations de la région de l’Ouest. Outre des quolibets lancés au passage du candidat à l’élection présidentielle, des acteurs bien connu de l’espace sociopolitique camerounais ont bruyamment manifesté leur courroux vis-à-vis de Cabral Libii et du chef culturel et cultuel des Bamoun.
Attaques xénophobes
Le plus illustratif est assurément la sortie de Jacques Noumsi. Activiste connu pour sa revendication du Bamiland, un projet promouvant l’érection de la région de l’Ouest en une fédération dénommée Bamiland a indiqué dans un post publié sur sa page Facebook
“Cabral Libii, l’audacieux va dire à Foumban que les Bamileke vont submerger les Bamouns si rien n’est fait.”
Une assertion démentie par les parties prenantes à la rencontre mais qui a néanmoins suscité une vague de propos xénophobes sur son mur et au sein de la communauté Bamileke.
La présentation de son livre intitulé “Ce que j’ai vu” et le Projet de fédéralisme communautaire promu par le président du Parti Camerounais pour la reconstruction nationale, Cabral Libii,
vient en fait réveiller un débat qui était provisoirement latent chez les acteurs politiques dans la région de l’Ouest. La région dont les ethnies Bamileke et Bamoun sont les plus connues est dominée par un débat communautaire de prégnant qui souvent convoque des arguments suprématistes chez certains acteurs.
Entre Bamiland et région Bamoun
La réalité est telle que, lorsque que certains ressortissants de la composante Bamileke revendiquent la création d’une fédération Bamiland, des acteurs politiques issus de la constituante Bamoun appellent à l’érection de la région du Noun. Une entité qui serait séparée de la rive droite majoritairement peuplée par l’ethnie Bamileke.
Le clivage est telle que le défunt sultan-roi des Bamoun en a fait un cheval de bataille. Sénateur et chef de file du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) dans la région de l’Ouest Ibrahim Mbombo Njoya a porté le projet de création de la région du Centre-Ouest à l’appréciation des autorités politiques et administratives.
Disparités potentialités
L’argumentaire soutenu jusqu’à date réside sur les disparités géographiques et culturelles entre les deux principales composantes sociologiques de la région de l’Ouest. Le dossier technique soutenu par l’élite culturelle et politique Bamoun met en exergue, a priori, la disparité dans la superficie entre la rive gauche et la rive droite du Noun. Pendant que l’espace majoritairement occupé par l’ethnie Bamileke est évalué à environ 4300 kilomètres carrés, celui occupé par l’ethnie Bamoun est d’environ 7600 kilomètres carrés.
La rivalité entre élites Bamileke et Bamoun réside aussi dans les présomptions d’hégémonie nourries de part et d’autre du Noun. Alors que la région Bamileke compte une population estimée à environ deux (02) millions d’âmes, celle du Noun compte environ 800 mille habitants. Une différence qui fonde les élites Bamileke a réclamer un élargissement de leur espace d’occupation à la rive gauche du Noun. Tandis que côté Bamoun, cette ambition est considérée comme une tentative d’annexion. Les titres d’occupation provisoires accordés à des ressortissants de l’ethnie Bamileke sur la rive gauche, il y a près de six décennies étant à l’origine des frictions récurrentes entre Bamoun et Bamileke sur la rive gauche du Noun.
Au tableau des disparités énoncé dans le plaidoyer Bamoun pour l’érection d’une région “autonome” figure la profusion des départements créés dans la région Bamileke. Alors que le Noun occupe deux fois la superficie de la région de l’Ouest, il garde le statut de département alors que la région Bamileke en compte huit. De même que l’élite Bamoun dénonce le déséquilibre observé dans la construction des infrastructures dans la région de l’Ouest. Infrastructures dont la majorité est accordée à la région Bamileke.
Dans le dossier technique transmis au gouvernement, le défunt sultan-roi des Bamoun, Ibrahim Mbombo Njoya déduit que
“Il apparaît clairement, de ce qui précède, que la région Bamoun, la plus grande et de loin celle qui regorge de potentialités économiques, devrait reprendre son autonomie du passé pour espérer reprendre sa croissance économique d’autrefois.”
Autant dire que, en promouvant son projet de fédéralisme communautaire dans un espace aussi détonnant, le président du Parti camerounais pour la reconstruction nationale et candidat à l’élection présidentielle, Cabral Libii surfe sur une vague haute. Dans les imaginaires locaux l’on y voit d’une part un soutien de poids à la volonté d’autonomisation de la région Bamoun et, côté Bamileke, le projet porté par le précurseur du fédéralisme communautaire apparaît comme un déni l’homogénéité prônée par les défenseurs de la libre occupation territoriale de la région de l’Ouest. la région de l’Ouest.